Trous noirs et autres astres exotiques

Trous noirs, trous blancs, trous de ver, quasars, pulsars… Éclairage sur ces astres exotiques de l’Univers qui fascinent par leur nature singulière et leurs propriétés étonnantes.

La représentation du trou noir et de son horizon des événements dans le film Interstellar.
La représentation du trou noir et de son horizon des événements dans le film Interstellar est proche de la théorie dans le cas d’un trou noir en rotation. Crédit : R.Hurt/Caltech

Les trous noirs

Ces objets célestes invisibles sont si compacts que leur champ gravitationnel empêche matière et lumière de s’en échapper… Il en existe plusieurs sortes.

D’abord, les trous noirs stellaires : ils correspondent au stade ultime de l’évolution de certaines étoiles massives dont la masse dépasse 25 fois celle de notre Soleil (lire notre dossier Les étoiles : naissance, vie et mort). Après avoir explosé en supernova, une étoile massive laisse place à une étoile à neutrons d’environ 10 kilomètres de diamètre et constituée uniquement de neutrons agglutinés. Mais la masse de l’étoile initiale était si élevée que la pression des neutrons (vers l’extérieur de l’astre) ne parvient pas à contrebalancer la gravitation (vers l’intérieur de l’astre). L’étoile à neutrons ultra-dense s’effondre donc sur elle-même et engendre la création… d’un trou noir.

Les trous noirs supermassifs ou galactiques se trouvant au centre de certaines galaxies possèdent quant à eux une masse colossale. Celle-ci peut atteindre plusieurs milliards de fois celle du Soleil. Les trous noirs intermédiaires ont une masse de quelques milliers de masses solaires. Enfin, les trous noirs primordiaux, dont l’existence n’est pas encore confirmée, se seraient formés peu après le Big Bang et auraient une masse bien plus faible que tous leurs cousins.

Les trous noirs déforment l’espace-temps

Image simulée par ordinateur d'un trou noir: autour de l'astre la lumière est déformée et chaque étoile a au moins une image de l'autre côté du trou noir (cercle noir) qui se trouve au centre de l'image.
Simulation d’un trou noir en avant-plan du Grand Nuage de Magellan, pour un observateur situé à 10 kilomètres. Autour de l’astre la lumière est déformée, le Grand Nuage est donc dédoublé en deux arcs de cercle (en haut et en bas du trou noir sur l’image). Une étoile située derrière le trou noir a également deux images, de part et d’autre du trou noir. Crédit : Alain Riazuelo

Comme on peut le constater sur la simulation ci-dessous, un trou noir produit de surprenants effets de « mirages gravitationnels » : certains astres du voisinage sont vus dédoublés. Pourquoi ? Parce que le trou noir déforme fortement l’espace en raison de sa densité (conséquence de la théorie de la relativité générale), ce qui perturbe le trajet des rayons lumineux.

Un trou noir est-il vraiment noir ?

Dans la conception classique des trous noirs, rien de ce qui franchit une limite imaginaire appelée « horizon des événements » ne peut s’échapper. Toutefois, le célèbre astrophysicien britannique Stephen Hawking a révolutionné cette idée avec le rayonnement de Hawking. Ce phénomène qui n’a pas encore été observé répondrait à la question : un trou noir est-il vraiment noir ? Ainsi, par différents processus quantiques, un rayonnement s’échapperait en permanence de ces astres. Cette évaporation serait toutefois très faible pour les trous noirs massifs et négligeable pour les supermassifs.

Comment arrive-t-on à détecter un trou noir ?

La présence d’un trou noir, notamment hyper-massif, peut être mise en évidence par ses effets induits. Cela peut être les rayonnements produits par de la matière qui tombe dans le trou noir. Ou encore par des mouvements d’étoiles environnantes trahissant la présence d’une très grande masse à proximité. Certaines étoiles du centre de notre galaxie ont ainsi été observées en rotation très rapide, un phénomène explicable seulement par la présence d’un trou noir.

Les trous blancs

Un trou blanc (ou fontaine blanche) est un objet hypothétique qui comme son nom l’indique est l’opposé du trou noir. En effet, tandis qu’en théorie rien ne peut s’échapper d’un trou noir, d’après les cosmologistes, rien ne peut pénétrer dans un trou blanc. De la matière et de l’énergie en sont éjectés en permanence. Toutefois, aucun processus astrophysique connu ne mène à la formation de tels astres. L’existence des fontaines blanches est donc toujours une supposition depuis son introduction dans la communauté scientifique dans les années 1960. Tout le contraire du trou noir, dont l’existence tend à être prouvée par de nombreuses observations.

Les trous de ver

Qu’obtient-on en combinant un trou noir et un trou blanc ? Et non, certainement pas un trou gris, mais un trou de ver. Cet objet est tout aussi hypothétique que la fontaine blanche. Il s’agirait d’un raccourci dans l’espace-temps permettant de voyager directement d’un point A à un point B de l’Univers, quelque soit la distance séparant ces deux points. Ce « tunnel » permettrait ainsi de se déplacer plus vite qu’en voyageant à la vitesse de la lumière sur le chemin « classique ». Le concept a été introduit en 1935 par Albert Einstein et le physicien israëlo-américain Nathan Rosen.

Illustration d’un trou de ver : l’horizon des événements du trou noir d’entrée est relié à celui du trou blanc de sortie. Crédit : Science et Vie

Mathématiquement, il existe quatre types de trous de ver :

  • de Schwarzschild, statique et infranchissable ;
  • de Reissner-Nordstrom, statique et franchissable en sens unique ;
  • de Kerr-Newman en rotation et franchissable en sens unique ;
  • de Lorentz, franchissable dans les deux sens.

Les allusions aux trous de ver sont nombreuses en science-fiction, comme récemment dans le long-métrage Interstellar. En effet, ils rendraient possible le voyage interstellaire aujourd’hui techniquement inenvisageable. Pour les plus imaginatifs, un trou de ver pourrait même relier deux univers…

Les galaxies actives

Certaines galaxies se distinguent par la présence en leur centre d’une région minuscule, appelée noyau, dans laquelle une énorme quantité d’énergie est produite par des processus non nucléaires. On les appelle « galaxies à noyau actif » ou « galaxies actives ». Il en existe trois grandes catégories : les quasars, les galaxies de Seyfert et les radiogalaxies.

Les quasars

Contraction de « quasi-stellar » (quasi-stellaire en français), un quasar correspond à la région compacte entourant un trou noir supermassif situé au centre d’une galaxie massive. Extrêmement lointains, ce sont les astres les plus lumineux de l’Univers : un quasar typique brille autant qu’un millier de galaxies ordinaires. Sa luminosité change très rapidement, parfois à l’échelle de seulement quelques heures. Les quasars font partie des objets les plus jeunes jamais observés. Le record est détenu par ULAS J1342+0928, observé en 2017 tel qu’il était 690 millions d’années après le Big Bang, soit seulement 5 % de l’âge actuel de l’Univers.

Ces astres se composent de trois éléments :

  • le trou noir supermassif central comportant la quasi-totalité de la masse du quasar ;
  • un disque d’accrétion formé par la matière qui tombe dans le trou noir ;
  • des jets de gaz qui sont expulsés de ce disque par les lignes de champs magnétique du trou noir à une vitesse proche de celle de la lumière.

Les quasars émettent du rayonnement radio (peu), infrarouge, visible, ultraviolet, X et gamma.

Au centre de l'image, un cercle violet est une image du quasar RXJ1131
Le quasar RXJ1131 situé à 6 milliards d’années de la Terre. Crédit : rayons X NASA/CXC/Univ_Michigan/R.C.Reis et optique NASA/STScI

Les galaxies de Seyfert

Les galaxies de Seyfert sont des galaxies spirales particulières. Elles possèdent en leur centre une région extrêmement brillante dont l’éclat peut dominer celui de la galaxie toute entière. La taille de ce noyau est estimée à une fraction d’année-lumière, ce qui est très faible comparé à la taille de la galaxie. Comme pour les quasars, la partie centrale des galaxies de Seyfert varie énormément en éclat au cours du temps. Mais cette fois, sur des périodes de l’ordre de plusieurs mois.

Elles émettent dans les domaines radio (peu), ultraviolet, infrarouge, gamma et X (en grande quantité) du spectre électromagnétique, et représenteraient plus de 10 % de l’ensemble des galaxies de l’Univers observable. On distingue les galaxies de type Seyfert 1 pourvues d’un noyau très lumineux, et de type Seyfert 2 à la luminosité centrale moins marquée.

Au centre la galaxie de Seyfert NGC 1433 entourée d'un halo brillant
La galaxie de Seyfert NGC1433 située à 32 millions d’années-lumière de la Terre. Crédit : ESA/Hubble Nasa

Les radiogalaxies

Toujours elliptiques et souvent au centre d’amas, les radiogalaxies dont le noyau central n’est pas forcément visible se caractérisent par un très fort rayonnement dans le domaine radio (d’où leur nom). Ce rayonnement est dix mille fois supérieur à celui d’une galaxie normale. Il provient de deux régions gigantesques appelées lobes radio. Ceux-ci mesurent dix fois la taille de la galaxie elle-même et sont situés de part et d’autre du plan galactique. Ils apparaissent toujours reliés au noyau de la galaxie par des filaments ou des jets de matière perpendiculaires au plan galactique.

Un cas particulier de radiogalaxie est appelé blazar. L’objet est ponctuel, très brillant et variable. Il se caractérise par ses jets qui selon qu’ils sont dirigés vers la Terre ou non, font varier sa luminosité d’un facteur un à cent d’un jour à l’autre.

Cygnus A, une des radiogalaxies les plus brillantes et les plus proches de notre Système solaire. Elle apparaît dans les tons bleu et rouge (émissions radio).
Cygnus A, une des radiogalaxies les plus brillantes et les plus proches de notre Système solaire. En rouge, les émissions radio, en bleu le rayonnement X. Crédit : rayons X NASA/CXC/SAO, optique NASA/STScI et radio NSF/NRAO/AUI/VLA

Les pulsars

Comme mentionné plus haut, après l’explosion d’une étoile massive en supernova, il reste une étoile à neutrons. Celle-ci tourne très rapidement sur elle-même (plusieurs fois par seconde) et projette un très fort rayonnement électromagnétique dans la direction de son axe magnétique. Ainsi, un pulsar est une étoile à neutrons produisant un signal périodique allant de l’ordre de la milliseconde à quelques dizaines de secondes. Lorsque la Terre se trouve dans l’axe du faisceau, l’observateur a l’impression de voir pulser l’étoile. De là vient l’origine du nom pulsar, abréviation de « pulsating radio source ».

Le plus puissant pulsar jamais observé (en rose) au centre de la galaxie Messier 82.
Le plus puissant pulsar jamais observé (en rose) au centre de la galaxie Messier 82. Crédit : NASA/JPL/CalTech

La plupart des pulsars émettent des ondes radio ou des rayons X. Les jeunes pulsars avec un champ magnétique très élevé sont appelées magnétars. Enfin, les pulsars milliseconde sont les pulsars à la vitesse de rotation la plus rapide.