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La mission européenne Gaia a publié fin 2020 le catalogue d’étoiles le plus riche et le plus précis de l’Histoire. Une occasion de revenir sur l’évolution des cartes du ciel, des débuts de l’astronomie jusqu’à nos jours.
La mission Gaia, lancée par l’Agence spatiale européenne (Esa) en décembre 2013, a fourni au mois de décembre 2020 la carte du ciel ou « planisphère céleste » le plus précis et complet jamais réalisé en astronomie. La sonde Gaia orbite à 1,5 million de kilomètres de la Terre, à l’opposé du Soleil pour éviter les perturbations lumineuses. Ses données sont dévoilées par étapes.
Les vagues de résultats sont publiées au fil de l’analyse des données par un consortium de laboratoires, le Data Processing and Analysis Consortium (DPAC), qui utilise des programmes informatiques très complexes exécutés dans six centres de traitement différents à Toulouse, Genève, Madrid, Turin, Barcelone et Cambridge.
Les deux premières salves de résultats Gaia Data Release 1 (DR1) et Gaia Data Release 2 (DR2) parues en 2016 et 2018, sont respectivement basées sur 14 et 22 mois de données. La première partie de la troisième vague s’appuyant sur 34 mois de mission entre juillet 2014 et mai 2017, Gaia Early Data Release 3 (EDR3), a été dévoilée en décembre 2020 et la suite sera disponible au premier semestre 2022.
Au total, à ce jour, ce sont la position, l’éclat et la couleur de plus de 1,8 milliard d’étoiles qui sont ainsi connus. Pour 1,5 milliard de ces sources lumineuses, sont également disponibles la parallaxe et le mouvement propre (déplacement des étoiles sur le fond du ciel – et oui en réalité les constellations changent très lentement de forme !).
NB : la parallaxe stellaire est l’angle sous lequel on verrait le demi-grand axe de l’orbite de la Terre depuis une étoile donnée. Cette mesure fournit une indication précieuse sur la distance de l’étoile au Système solaire.
La combinaison de ce foisonnement d’informations a permis de tracer la carte du ciel tridimensionnelle la plus précise jamais élaborée…
À noter que la température de 150 millions d’étoiles, la position de plus de 14 000 objets du Système solaire – principalement des astéroïdes -, les propriétés des Petit et Grand Nuages de Magellan ainsi que le mouvement propre de plus de 1,6 million de quasars utiles à la mesure fine de l’accélération du Système solaire autour du centre de la Galaxie, font aussi partie du champ d’études rendu possible par le catalogue Gaia EDR3.
En 2022, une nouvelle vague de résultats devrait notamment contenir une liste toujours plus exhaustive des exoplanètes massives autour du voisinage solaire, la classification des étoiles variables (étoiles dont la luminosité varie) ou encore des informations sur la galaxie d’Andromède.
Avec seulement la deuxième version du catalogue Gaia DR2 disponible, les astrophysiciens sont parvenus à déterminer que la Voie lactée comporte environ 120 000 étoiles comparables au Soleil, ou encore que notre galaxie aurait « fusionné » avec une autre galaxie il y a environ dix milliards d’années. La publication de la version définitive du catalogue Gaia, qui devrait avoir lieu en 2028, augure ainsi d’autres grandioses découvertes.
Plus généralement, la connaissance de la position et du mouvement des étoiles permet de déterminer les propriétés physiques, la structure et l’évolution de celles-ci, et de fil en aiguille d’aboutir à une meilleure compréhension de la structure et de la dynamique des galaxies.
Avant Gaia, la « star » de la détection d’étoiles était l’High precision parallax collecting satellite, ou Hipparcos, lancé en 1989. Bien que doté d’une orbite très elliptique qui différait de son objectif initial, ce satellite a permis la production de trois catalogues d’étoiles : Hipparcos, Tycho-1 et Tycho-2.
La mission a fourni la position, le mouvement propre et l’éclat de plus de 2,5 millions d’étoiles du voisinage solaire. Certes, le satellite Gaia effectue des mesures environ 1 000 fois plus précises et est capable de détecter des étoiles très peu brillantes (jusqu’à magnitude 20), ce qui lui permet d’observer toute la Galaxie et même au-delà…
Mais Hipparcos a bel et bien révolutionné notre représentation du ciel, puisque jusqu’alors on ne pouvait déterminer la position que de 8 000 étoiles à peine ! De plus, la mission a pré-découvert l’existence de deux exoplanètes aujourd’hui confirmées, ou encore mis en lumière le fait que la Voie lactée change de forme.
En outre, on peut se demander de quelle manière étaient établies les cartes du ciel avant l’ère des satellites Hipparcos et Gaia. Repartons loin, très loin, aux débuts de l’astronomie…
Le premier outil d’observation du ciel est bien sûr l’œil nu. Avec plus de 3 000 astres visibles la nuit, les observateurs regroupent rapidement les étoiles les plus brillantes sous forme de constellations pour un meilleur repérage dans la voûte céleste. La plus ancienne carte du ciel retrouvée à ce jour et qui représente cette voûte étoilée est le disque de Nebra. Découvert en 1999 en Allemagne, le disque en bronze et or date d’environ 1600 ans av. J.-C., et montre le Soleil (cercle), la Lune (croissant), la Voie lactée (arc de cercle) et des étoiles, dont un groupe de sept représentant certainement l’amas des Pléiades.
À l’Antiquité, les astronomes rédigent les premiers catalogues d’étoiles avec pour chaque astre un nom, des coordonnées et une magnitude apparente. Hipparque, d’où provient le nom du satellite Hipparcos, était très probablement l’un d’eux. Les seuls témoins matériels de ces premiers recensements sont les écrits de Ptolémée, avec un catalogue de 1 022 étoiles et 48 constellations dans son ouvrage l’Almageste.
Les astronomes grecs, puis chinois ou arabes dans les siècles qui suivent, représentent également le ciel sous la forme de globes où figurent étoiles et constellations, mais aussi l’équateur, l’écliptique, les tropiques et les cercles polaires.
Toutes ces représentations sont souvent biaisées par la date à laquelle sont effectuées les observations, ainsi que les mythes et croyances de chaque civilisation. Avec l’invention de l’astrolabe à la fin du XVe siècle par les navigateurs portugais, la carte du ciel s’uniformise enfin et finit par gagner en précision, puis en nombre d’étoiles avec l’arrivée de la lunette astronomique et du télescope au XVIIe siècle.
Au fil des années, le nombre d’étoiles recensées et caractérisées ne cesse d’augmenter et fait notamment un bond colossal avec la construction des grands observatoires, dans un premier temps terrestres. Durant la seconde moitié du XXe siècle émergent ensuite les observatoires spatiaux, qui permettent de pallier les perturbations de l’atmosphère et l’impossibilité d’observer l’ensemble de la voûte céleste depuis un même point sur Terre. C’est l’ère des missions Hipparcos et Gaia, pour l’heure sans équivalents non européens. Avec plus d’un milliard et demi d’étoiles identifiées, Gaia bat tous les records, mais n’a toutefois répertorié qu’un peu moins de 1 % des étoiles de la Voie lactée qui en contient probablement entre 100 et 200 milliards…
Alors en attendant, ce sont les étoiles les plus brillantes de la voûte céleste et que nous connaissons depuis longtemps qui sont à la base des cartes du ciel utilisées en astronomie amateur. Les cartes se sont modernisées et ont été schématisées pour plus de lisibilité. Ces planisphères du ciel contemporains peuvent contenir entre 300 et 800 étoiles, et permettent grâce à un système coulissant d’obtenir l’aspect du ciel à une date et une heure données, en fonction de la latitude d’observation. La carte du ciel réalisée et éditée par Stelvision contient par exemple 802 étoiles.
Finalement, il existe des cartes du ciel électroniques, consultables sur ordinateur ou smartphone. C’est sans doute ce type de support qui permettra, un jour, de créer une carte aux plusieurs milliards d’étoiles.
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